Les éléates

Les écoles italiennes se caractérisent par l’expérience intellectuelle couplée à une pratique de transformation de la vie. Pour les éléates et notamment Parménide, le principe de toute chose est l’Étant, l’Un, cette unité homogène de l’Univers, immuable, éternel, sans commencement, ni fin… Bref, hors du temps.  

Xénophane (570-475 av. n. ère) : Xénophane émigre en 540 avant notre ère de Ionie en Italie du Sud, plus précisément à Elée. Écrivant toujours en vers, Xénophane pense que les représentations anthropomorphiques des divinités ne sont pas acceptables. Il s’en prend aux mythes, à la religion traditionnelle et aux récits homériques.

Xénophane pense qu’il y a un dieu unique. Plus grand que tout ce que l’on a imaginé, en rien semblable aux mortels, ni par le corps ni par l’esprit.

Parménide (515-450 av. n. ère) : Homme politique, adhérant au pythagorisme, Parménide était élève de Xénophane. Parménide a posé les bases de l’Ontologie, de l’étude de l’Être.

Il expose sa pensée dans un traité, qui a pris la forme d’un poème. Seuls quelques vers nous sont parvenus. Il se compose de parties : un prélude ; « la voie de la vérité » et la « voie de l’opinion » (doxa). La croyance naïve d’une connaissance du monde et des phénomènes relève de l’opinion. Certes, le changement est perçu, mais il ne s’agit que d’une illusion. Le chemin de la vérité et par là même sa connaissance montre que si le passé et le présent nous sont déjà connus, le futur est quant à lui déjà posé. Tout est Un, sans commencement, éternel, immuable et hors du temps.  

Dans son traité, Parménide y développe son concept d’étant (einai).

Parménide fait l’une des premières distinctions particulièrement abstraites dans l’histoire de la philosophie : « c’est » et « ce n’est pas ». Le « est » (estin) possède différentes valeurs. Il marque :

  • l’existence : « Je pense, donc je suis »
  • la prédication (le sujet et son prédicat) : « Socrate est un philosophe ».
  • l’identité : « Voltaire est François-Marie Arouet ».
  • la vérité : « C’est cela ».
  • l’inclusion dans une classe ou un genre : « Socrate est un homme ».
  • la constitution : « cette statue est en bois ».

Le « estin » a une valeur existentielle. Or, selon Parménide, une recherche ne peut porter sur ce qui n’existe pas. De même, le « estin » a une valeur de prédication. Or, une recherche ne peut porter sur ce qui n’est pas doté de telles ou telles caractéristiques. Parler du non-existant est inintelligible.

Pour Parménide, tout est Un, permanent et indivisible : soit une chose existe, soit elle n’existe pas. Rien ne peut sortir ou naître du néant. Dès lors, si une chose existe, alors elle a toujours existé. A l’opposé d’Héraclite, le changement et le mouvement sont alors impossible.

L’Être est par ailleurs fini, car s’il était infini, il manquerait de tout. Or, il ne manque de rien. Pour Parménide, l’Étant est alors Un, immuable et parfait.

Si Xénophane considérait un dieu unique, Parménide se concentrera sur ce qu’il nomme : l’étant. Il s’oppose radicalement à Héraclite pour qui “tout passe et rien ne demeure”. 

Zénon d’Élée (490-430 av. n. ère) : Zénon a vécu à Élée. Lors d’un voyage à Athènes avec Parménide, il rencontra Socrate, alors jeune homme. A la suite d’une tentative de renversement du tyran de la cité d’Élée, Zénon subit la torture et mourut de ses blessures.

Considéré par Aristote comme le père de la dialectique, Zénon défendit la conception du monde et de l’Un de Parménide de brillante manière. Il est surtout connu pour ces célèbres paradoxes sur la non-réalité du mouvement : Achille et la tortue, la flèche,…

Une flèche doit parcourir une certaine distance pour atteindre sa cible. Or, cette distance peut être divisée par deux, puis à nouveau par deux et ainsi de suite. Dès lors, la flèche sera en théorie toujours au repos, ne pouvant jamais atteindre sa cible.

L’école des cyniques, par Antisthène ou son disciple Diogène, aurait répondu aux arguments de Zénon sur l’impossibilité du mouvement simplement en marchant. En réalité, Zénon veut montrer l’absurdité d’une conception du mouvement et de sa divisibilité. Ces paradoxes ont occupé les philosophes et logiciens jusqu’à nos jours.

[1] A noter que les nombres sont ce qui correspond actuellement à nos entiers positifs.